Au LAPP, MARTA utilise du CO2 pour refroidir des pixels

Publié par Laboratoire d'Annecy de Physique des Particules (LAPP), le 19 septembre 2018   1.4k

L’équipe ATLAS du LAPP vient de mettre en marche une usine de refroidissement compacte qui utilise le CO2 diphasique, c’est-à-dire possédant une phase gazeuse et une phase liquide. Cette machine, nommée MARTA (Monoblock Approach for a Refrigeration Technical Application) va permettre au LAPP de pousser plus loin ses travaux sur les détecteurs à pixels.

Les détecteurs à pixels dans ATLAS servent à détecter le passage des particules chargées au plus près du point de collision des protons. Les Pixels de prochaine génération pour le HL-LHC auront une taille de 50 par 50 micromètres et seront regroupés sur des modules rectangulaires de quelques centimètres de côté où est aussi attaché une première électronique de traitement (modules Pixel). Pour refroidir ces objets à des températures comprises entre -10 et -40 °C, la technologie CO2 est apparue il y a une dizaine d’année. Le CO2 a avantageusement remplacé la famille des fréons qui sont nocifs pour l’atmosphère et il est déjà utilisé pour des détecteurs ATLAS et LHCb ou sur l’expérience AMS. C’est cette technologie que met en oeuvre l’usine de refroidissement MARTA. Elle fournit du CO2 liquide sous pression avec une température réglable qui est ensuite amené auprès des Pixels pour les refroidir.

Une expertise de longue date

L’expertise CO2 dans les détecteurs de physique des particules a été initiée au CERN et par le laboratoire Nikhef (Amsterdam). Le groupe ATLAS du LAPP est expert dans l’utilisation de cette technologie depuis la construction de l’IBL (Insertable B-layer) entre 2007 et 2014. L’équipe a en effet fabriqué et mis en oeuvre un système de refroidissement CO2 en boucle ouverte (le CO2 est relâché dans l’atmosphère après utilisation) suivant les recommandations de Nikhef. Le CO2 arrivant à température ambiante est refroidi, amené sur des systèmes chauffants mimant la production de chaleur des Pixels puis est relâché dans l’atmosphère. Associé à des bancs de mesure construits et instrumentés par les équipes techniques du groupe ATLAS-LAPP, ce système a permis de mesurer les propriétés de transfert de chaleur dans les vraies conditions de fonctionnement d’un détecteur. Deux doctorants ATLAS-LAPP se sont succédés sur ce projet avec, entre autre, la démonstration que les modules Pixels peuvent être suffisamment refroidis même avec des pixels inclinés (« géométrie alpine »).


Banc de test des détecteurs à pixels utilisant l’usine de refroidissement MARTA

Ce système de refroidissement peut consommer jusqu’à 2 bouteilles de CO2 de 34 kg par jour pendant les campagnes de mesure intensives. Pour poursuivre les campagnes de tests thermiques dans des conditions de fonctionnement plus stables et minimiser la quantité de bouteilles de CO2, il fallait passer à une circulation et refroidissement en boucle fermée pour récupérer le CO2 et le refroidir à nouveau. C’est ce que permet MARTA. Elle permettra surtout, dans les années 2020 à 2023, de réfrigérer du CO2 qui refroidira les Pixels pour pouvoir les mettre en marche et s’assurer de leur bon fonctionnement avant envoi au CERN.

Avec la généralisation de cette technologie pour le programme LHC Haute Luminosité (2026-2037), le CERN s’est associé à des industriels polonais pour faire produire une telle machine avec de meilleures performances que les machines déjà développées en interne.

Grâce au financement du Labex ENIGMASS pour le programme Pixel, l’équipe ATLAS a pu s’équiper de cette nouvelle usine qui est encore l’unique exemplaire à l’IN2P3. Elle a été mise en route début septembre 2018 dans la salle blanche ATLAS. Grâce à l’expertise locale, son intégration aux bancs existants va se faire rapidement pour lancer les prochaines campagnes de mesure à l’automne. D’autres équipes IN2P3 ont déjà montré un intérêt pour profiter de ce savoir-faire.

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